Des originaux de Rodin… 100 % copiés !

En produisant des Rodin par centaines, Guy Hain devient dans les années 1980 l'un des plus grands faussaires de la sculpture !

1992, en Haute-Saône. La police perquisitionne un atelier qui fond des statues en bronze. Surprise : les policiers découvrent des centaines de sculptures du célèbre Auguste Rodin ! Comment est-ce possible ? S’agit-il de vulgaires copies ?

Gilles Perrault, expert pour la Cour de cassation, au milieu d'une saisie de contrefaçons de sculptures de Rodin, 1999. Photo : Gilles Perrault

La signature du fondeur Alexis Rudier, sur une sculpture en bronze de Charles Adolphe Würz, Place Saint-Pierre-le-Jeune, Strasbourg. Photo : Ji-Elle

À première vue, les œuvres ressemblent pourtant à des bronzes originaux de Rodin. Elles ont été fondues à partir de moules en plâtre conçus par le maître. Et, comme sur les bronzes originaux du tout début du 20e siècle, on retrouve la marque d’Alexis Rudier, l’artisan chargé du vivant de Rodin de fondre ses sculptures en métal. Sauf que… ces centaines de statues ont toutes été faites entre 1984 et 1992 !

Les policiers viennent en réalité de mettre la main sur l’un des plus grands faussaires de la sculpture : Guy Hain. Cet ancien vendeurs de produits vétérinaires a monté une entreprise d’une incroyable ingéniosité. Devenu marchand d’art, il s’est associé à la prestigieuse fonderie Rudier. Cette dernière, qui collabore avec le musée Rodin, conserve des moules originaux du maître.

L'hôtel Biron, qui abrite le musée Rodin, Paris. Photo : Pierre Lannes

Auguste Rodin, L'Âge d'airain, 1877, bronze (original), 178 × 62 × 61 cm, Musée d'Orsay, Paris

L’usage de ces moules est bien entendu rigoureusement encadré par le musée. Légalement, une statue en bronze est considérée comme "originale" seulement si on n’excède pas 12 tirages à partir du moule d’origine. Au-delà, les statues ne sont plus des originales, mais des reproductions. La mention "Reproduction" doit alors apparaître clairement, et cela change drastiquement leur valeur sur le marché de l’art !

Sauf que Hain a massivement utilisé ces moules… sans prévenir le musée. Il a ensuite vendu en toute illégalité ces contrefaçons en les faisant passer pour originales, bernant au passage les plus grands spécialistes. À son procès, on dénombre plus de 6000 de ces faux !

Depuis, seul un tiers a été identifié, ce qui signifie que plusieurs milliers sont encore en circulation…

À découvrir