Le Roc-aux-Sorciers, un repère de bisons

Au 20e siècle, deux préhistoriennes françaises mettent au jour un trésor de l'art pariétal...

1947, dans la Vienne. Sur le site préhistorique du Roc-aux-Sorciers, Suzanne de Saint-Mathurin fouille le sol avec application. D’autres avant elle ont découvert à cet endroit des traces d’occupation humaine, mais elle espère trouver plus… Soudain, elle jubile : sur l’une des pierres, on dirait bien une paire de pattes !

Tête de bison, environ 15 000 ans avant notre ère, calcaire gravé, 35 x 31 x 16 cm, site préhistorique du Roc-aux-Sorciers, Angles-sur-l'Anglin, Musée d'Archéologie nationale et Domaine national de Saint-Germain-en-Laye. Photo : © RMN-Grand Palais (musée d'Archéologie nationale) / Jean-Gilles Berizzi

Suzanne de Saint-Mathurin époussette fiévreusement le bloc de calcaire… Comme elle l’avait pressenti, il s’agit d’un animal sculpté dans la pierre. En continuant à chercher parmi les centaines de blocs effondrés de la falaise, elle en trouve une multitude d’autres. Devant l’ampleur de la découverte, elle fait alors appel à une amie, Dorothy Garrod, également préhistorienne.

Suzanne de Saint-Mathurin et Dorothy Garrod, mars 1949, site préhistorique du Roc-aux-Sorciers, Angles-sur-l'Anglin. Photo : © MAN, archives Suzanne Cassou de Saint-Mathurin

Ensemble, elles dégagent la paroi rocheuse et mettent au jour une exceptionnelle frise sculptée et gravée de 20 mètres de long. On peut y reconnaître de nombreux animaux : bouquetins, chevaux, bisons... Plus rare encore, des figures humaines sont soigneusement taillées dans la paroi, représentant des femmes à différentes étapes de leur vie. L’état de conservation de ces sculptures, créées il y a plus de 15 000 ans, est incroyable.

Bouquetins, site préhistorique du Roc-aux-Sorciers, 15 000 ans BP, Angles-sur-l'Anglin, 1984. Photo : Région Nouvelle-Aquitaine, Inventaire général du patrimoine culturel

Pour financer ses importantes recherches sur le site, Suzanne de Saint-Mathurin met ses talents de dessinatrice au service de la mode et invente des modèles pour le grand magasin Le Bon Marché à Paris. Dès que les caisses sont remplies, elle retourne sur le terrain. Pendant quinze ans, la préhistorienne étudie avec acharnement ce trésor sculpté.

La découverte est si remarquable que le site est surnommé le "Lascaux de la sculpture", en référence à la célèbre grotte peinte qui date de la même période, le Magdalénien. Quant à la signification de ces sculptures, elle demeure encore bien mystérieuse…

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