Marie-Victoire Jaquotot, la copiste qui imposait ses conditions au Louvre

Le secret de Marie-Victoire Jaquotot ? Une maîtrise parfaite de la peinture sur porcelaine, qui la plaçait au sommet de son art - et au-dessus des règles du Louvre.

1822. Le directeur du musée du Louvre est agacé. Lui qui se réjouissait de l'acquisition d’une œuvre renommée, il lui est impossible de l’exposer dans ses salles. Eh oui, à peine cinq jours après son achat, le tableau Psyché et l’Amour de Gérard vient d’être… emprunté par une copiste, Marie-Victoire Jaquotot !

 

François Gérard, Psyché et l'Amour, 1798, huile sur toile, 180 x 130 cm, Musée du Louvre, Paris / Marie-Victoire Jaquotot, Autoportrait, 18e siècle, huile sur panneau, 21,8 x 16 cm, lieu de conservation inconnu

À l'époque, on ne refuse rien à cette artiste spécialisée dans la copie sur porcelaine. En effet, cette technique est très bien considérée. On pense qu'elle apporte la solution à un gros problème : les tableaux se détériorent avec le temps et perdent leurs couleurs éclatantes.

Or, la peinture sur porcelaine est inaltérable. Grâce aux copies, on conserve donc l'aspect d’origine des œuvres pour les générations futures.

Marie-Victoire Jaquotot, La Sainte Famille (d'après l'œuvre de Raphaël), 1825, peinture sur porcelaine, 46 x 33,5 cm, Cité de la céramique - Sèvres et Limoges, Limoges, photo : © RMN-Grand Palais (Sèvres - Manufacture et musée nationaux) / Thierry Ollivier et Corinne au Cap Misène (d'après l'œuvre de François Gérard), 1825, peinture sur porcelaine, 59 x 48,5 cm, Cité de la céramique - Sèvres et Limoges, Limoges

Pour les copistes comme Jaquotot, c’est un défi de taille. Impossible d'appliquer directement les couleurs sur la fragile porcelaine : l'artiste place en réalité des oxydes métalliques en poudre sur la plaque. Ce n'est qu’après la cuisson que les véritables couleurs se révèlent.

Il faut donc des connaissances scientifiques en plus d’un vrai savoir-faire pour se rapprocher du style de l'artiste d’origine… Et tout cela en miniature !

Jaquotot maîtrise justement cet art à la perfection. Elle a apporté ses lettres de noblesse à la technique. Son succès est tel que le roi de France en personne collectionne ses œuvres précieuses et lui donne le prestigieux titre de "Peintre sur porcelaine du Roi".

François-Joseph Heim, Charles X distribuant des récompenses aux artistes exposants du Salon de 1824 au Louvre, détail, 1825, huile sur toile, 173 x 256 cm, Musée du Louvre © RMN - Grand Palais (Musée du Louvre) / Philippe Fuzeau. Marie-Victoire Jaquotot figure au centre de la scène entre le roi et le récompensé.

Avec un tel soutien, Jaquotot peut imposer ses sujets de copie… et ses prix. Elle est ainsi l’une des artistes les mieux payées de son temps. Autant dire que le directeur du Louvre ne peut rien lui dire. Pendant vingt ans, il lui prêtera des œuvres sans rechigner… ou presque !

Anne-Louis Girodet, Mademoiselle Lange en Vénus, 1798, huile sur toile, 170 x 88 cm, Musée des Beaux-Arts de Leipzig / Marie-Victoire Jaquotot, Vénus (d'après l'œuvre de Anne-Louis Girodet), 1827, peinture sur porcelaine, 33,7 x 17,7 cm, Musée Fabre, Montpellier

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