Le "kintsugi" ou l'art d'embellir les objets brisés

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Voici l'origine - sans doute romancée - de l'une des plus belles traditions esthétiques du Japon : le kintsugi, une technique bien spéciale permettant de réparer les fissures avec de la laque et de la poudre d'or.

15e siècle, Japon. Le seigneur Ashikaga, dépité, contemple les morceaux de son bol à thé favori. Dans un geste maladroit, il vient de le briser accidentellement. Vite, il faut les meilleurs artisans pour le réparer ! Comme le bol est d’origine chinoise, on s’adresse aux artisans les plus réputés de Chine. Le bol du seigneur commence alors un long voyage…

Illustration : Aurora Muggianu pour Artips

Expédié en Chine, il est réparé grâce à de fines agrafes de métal qui maintiennent les fragments entre eux. Mais le seigneur est horrifié par le résultat : il juge les agrafes disgracieuses, et le bol n’étant plus étanche, il est devenu inutilisable. Si les artisans chinois n’y sont pas arrivés, peut-être que les artisans japonais pourraient trouver une solution ?

Bol en porcelaine "Bakōhan" du 13e siècle réparé à l'aide d'agrafes, Tokyo National Museum. Photo : ColBase: Integrated Collections Database of the National Institutes for Cultural Heritage, Japan

Pour satisfaire le seigneur, les artisans spécialistes de la laque mettent au point une technique, le kintsugi. Cela signifie littéralement "jointure d’or" : les différents morceaux sont assemblés grâce à de la laque, une sève très adhésive.

Après plusieurs étapes complexes et beaucoup de patience, l’artisan ajoute de la poudre d’or sur la surface laquée, ce qui donne ces cicatrices dorées. Grâce à ces réparations, le bol est à nouveau utilisable et les fissures sont devenues très esthétiques. Le seigneur est ravi !

Bol à thé en grès réparé avec la technique du kintsugi, musée Guimet, Paris. Photo : Jean-Pierre Dalbéra, CC BY 2.0

Cette histoire sur l’origine du kintsugi, probablement légendaire, illustre un certain type de rapport aux objets. Un seigneur occidental de l’époque se serait immédiatement débarrassé de son bol brisé, l’accident lui ayant fait perdre toute valeur. Mais il n’en est pas de même en Asie : un objet abîmé peut toujours trouver une deuxième vie. Ces accidents lui donnent même davantage de valeur !

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