Révolution industrielle : focus sur l'inégalité environnementale qui a façonné la ville de Paris

Savez-vous pourquoi les quartiers bourgeois se trouvent principalement dans l'Ouest de la capitale française ? L'explication est à chercher... du côté du vent !

1836, Paris, actuel 15e arrondissement. Au retentissement de la sonnerie, un flot d’ouvriers s’échappe de l’usine à gaz de Grenelle et met le cap à l’Est, vers les quartiers ouvriers de la capitale et de ses faubourgs. Plus discrètement et à contretemps, les cadres sortent à leur tour et prennent aussi la route du retour chez eux. Avec une différence notable : contrairement aux ouvriers, ils se dirigent vers l’Ouest.

L'usine à gaz de Grenelle, 19e siècle. Photo : DR

À l’époque, une séparation Est-Ouest de la capitale commence en effet à se dessiner. L'explication de ce phénomène social est à chercher du côté du vent. La brise venue du bois de Boulogne pour rafraîchir l'Ouest parisien ? Non, ce n’est pas ce type de vent qui détermine cette répartition géographique des classes sociales. Le responsable, c’est ce vent qui souffle la plupart du temps d'Ouest en Est et se charge des fumées noires et des odeurs étouffantes que rejettent les usines.

Carte de Paris : à l'Ouest les quartiers bourgeois et l'usine de Grenelle, à l'Est les quartiers ouvriers. Illustration Artips

En pleine Révolution industrielle, ces pollutions augmentent d’année en année et, poussées par le vent, planent constamment au-dessus de l'Est de Paris. La qualité de vie des ouvriers en est bien sûr très amoindrie. Aujourd’hui, on appelle cela une inégalité environnementale : une exposition aux facteurs de pollution des milieux (air, sol, eau) ou aux aléas environnementaux qui n’est pas la même pour toutes les populations.

Les ouvriers logés à l’Est souffrent donc d’une double peine : à leurs difficultés socio-économiques s’ajoutent les pollutions atmosphériques et leurs conséquences. Notamment les maladies respiratoires, même si on ne fait pas forcément le lien à l’époque.

Rue de Belleville, début du 20e siècle, carte postale // L'avenue du Bois de Boulogne, 1900, carte postale

L’usine de Grenelle ferme au début du 20e siècle, suivie progressivement par d’autres fabriques, qui déménagent en périphérie. Leur départ ne change cependant rien à l’implantation géographique des classes sociales, trop fortement établie. Comme bien des capitales européennes, Paris conserve ainsi les marques d’une inégalité environnementale disparue il y a plus d’un siècle.

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